Air2030 — En application de la « Lex Gripen »

Dans son article du 1er mars 2019, le Tages Anzeiger nous apprend sous la plume de Markus Häfliger qu’armasuisse, le centre de compétences pour les acquisitions du DDPS, a tiré la leçon de la débâcle du Gripen — la « Lex Gripen ».

Dans une lettre adressée à la fin janvier 2019 aux cinq constructeurs en compétition dans le cadre du programme Air2030, armasuisse précise que :

  1. l’autorité d’évaluation n’hésitera pas à sortir de la compétition l’avion qui ne satisfera pas aux conditions fixées pour les essais ;
  2. si un avion n’est pas en mesure de passer un des tests, parce qu’un système n’est pas encore techniquement au point (maturité du système), celui-ci sera immédiatement exclu de la compétition ;
  3. les quatre sous-systèmes essentiels doivent être matures : radar, équipements de guerre électronique, capteurs optiques et ce qu’on appelle la liaison de données.

Pourquoi est-ce important ?

Parce que quelque 5 ans après la débâcle du Gripen dans les urnes le dimanche 18 mai 2014, si nous voulons disposer d’une défense aérienne crédible à l’avenir également, le projet Air2030 doit réussir ! Il en va de la survie des Forces aériennes suisses.

Cela implique de convaincre en votation populaire. Une fois au moins, dans le cadre d’un référendum ; deux peut-être, sous la pression d’une initiative populaire.

Pour y parvenir, il faut que la population, le Parlement et tout ce que le pays compte de militaires de milice aient confiance dans le processus d’évaluation mis en place par la gouvernance du projet. Impérativement.

Il faut éviter que ne germe l’idée que les critères d’évaluation définis initialement par la gouvernance du projet s’adaptent en cours de route afin de favoriser tel candidat ou tel autre ; que le processus d’évaluation pourrait être à géométrie variable.

C’est une question de confiance de la population, du Parlement et des militaires dans la robustesse du processus d’évaluation défini à l’origine du programme, partant dans la décision que le Conseil fédéral prendra in fine quant à la meilleure solution possible en termes de capacités, de support et de logistique, de relations de gouvernement à gouvernement, d’affaires compensatoires — ou « offsets » — ainsi que d’opportunités stratégiques pour le pays en matière de recherche, de développement et d’innovation pour notre place industrielle ainsi que nos hautes écoles et centres de recherches.

Il s’agit d’être conséquent tout au long de la procédure d’évaluation du nouvel avion de combat, pour être digne de la confiance de la population.

Aussi, un « insuffisant » à un moment donné de la procédure d’évaluation doit être communiqué comme un « insuffisant ». Et non comme un « sera suffisant » ou « satisfera aux critères d’évaluation » …dans six mois, une année ou au moment de la livraison.

Les conséquences doivent donc être tirées en cours d’évaluation, implacablement, pour regagner la confiance du Parlement, de la population et de l’armée dans la procédure d’évaluation, après la défiance qui a entraîné la débâcle du Gripen.

Air2030 doit réussir ! Car il en va de la survie des Forces aériennes suisses, sans lesquelles nous ne pourrions plus exercer notre souveraineté aérienne, indispensable à notre souveraineté territoriale, elle-même garante de l’exercice de nos libertés et de nos droits démocratiques. Une Suisse ne parvenant plus à exercer sa souveraineté sur son espace aérien, serait une Suisse plus à même d’abriter en terrain neutre les sièges des grandes organisations internationales ainsi que des conférences de paix ou des sommets, ni de protéger de façon crédible le dépôt de la Convention des droits de l’Homme ainsi que le siège de la Croix-Rouge et in fine sa propre population. Une Suisse qui deviendrait vulnérable, diplomatiquement et politiquement, par la force des choses.

Air2030 — En application de la « Lex Gripen »
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